Le non-recours

Avoir droit au BIM et ne pas en profiter : pourquoi ?

Étonnamment, le nombre de bénéficiaires du BIM évolue peu. Or, cela peut être un indicateur d’un taux de non-recours important au vu de l’augmentation de la pauvreté et de la croissance démographique.

Le 4e plan fédéral de lutte contre la pauvreté et de réduction des inégalités1https://www.mi-is.be/sites/default/files/documents/4e-plan-federal_0.pdf, sorti en novembre 2022, indique que « le risque de pauvreté de la population de moins de 60 ans n’a pas baissé en Belgique pendant ces dernières années. Au contraire, il a plutôt augmenté en dépit d’un contexte économique globalement favorable jusqu’au début 20202Bureau du Plan – Working paper 6-21 ». Peu avant la crise liée à la Covid-19, en 2019, 14,8% des Belges étaient considéré·es comme à risque de pauvreté monétaire (ménage dont le revenu total disponible est inférieur à 1 230€ par mois pour une personne isolée) ; 12,4% de la population vivait dans un ménage à faible intensité de travail ; 4,4% des Belges souffraient de privation matérielle sévère. Un enfant sur 5 vivait sous le seuil de pauvreté.

Le Comité de l’assurance de l’INAMI (où siègent les mutualités, les prestataires de soins et les établissements de soins) a abouti, en octobre 2023, sur un accord de budget concernant les soins de santé. Il s’agit là d’un budget de 37,3 milliards d’euros est prévu pour 2024, dont 162,5 millions d’euros pour une nouvelle politique de santé.

Dans ce budget, le Comité préconisait l’octroi automatique du statut BIM aux chômeur·euses ainsi qu’aux personnes invalides isolées. Mutualités et dispensaires de soins demandaient également la fin du statut de cohabitant·e pour l’octroi du BIM aux personnes invalides. Le dernier conclave budgétaire fédéral a pris la décision de maintenir le statut de cohabitant·e pour les personnes invalides. L’automatisation du statut BIM leur est par contre accordé.

Le non-recours aux droits : un facteur d’appauvrissement

Selon le SPP (Service Public de Programmation3Les SPP s’occupent de dossiers liés à des enjeux de société qui nécessitent une coordination entre plusieurs SPF (Service Public Fédéral) comme en ce qui concerne l’intégration sociale.) Intégration Sociale, dans différents domaines de la protection sociale, le terme de « non-recours aux droits » renvoie à toute personne qui ne bénéficie pas d’une allocation ou d’une prestation de services alors qu’elle pourrait en bénéficier. Ce non-recours accroît le risque de précarité socio-économique et d’isolement des individus qui ne bénéficient pas des aides ou des droits auxquels iels pourraient prétendre.

Trois circonstances principales peuvent expliquer ce décalage entre la reconnaissance d’un droit et le fait que la personne n’en soit pas bénéficiaire4https://sms.hypotheses.org/11105 :

  1. La première est la non-connaissance des droits : les ayants droit potentiel·les ne sont pas informé·es du droit ou du service ou de leurs conditions d’octroi.
  2. La seconde cause est la non-demande des droits : les personnes ciblées renoncent volontairement à solliciter le droit ou le service reconnu par crainte des stigmates attachés à une situation de pauvreté ou du découragement induit par la complexité administrative ou encore pour tout autre motif de contestation de la mesure garantie.
  3. Le troisième motif de non-recours est la non-réception du droit ou du service garanti : le droit, bien que connu et sollicité, n’est pas octroyé. Soit qu’aucune réponse n’est adressée aux demandeur·euses, soit que le droit est refusé en méconnaissance des textes en vigueur.

Une réponse possible au non-recours aux droits (en anglais « non take-up ») est l’automatisation des droits. Revendications

Il existe 4 niveaux d’automatisation des droits5https://www.mi-is.be/fr/etudes-publications-statistiques/automatisation-des-droits :

  1. Ouverture automatique d’un droit : c’est la forme la plus simple d’automatisation d’un droit. L’autorité examine si la personne entre dans les conditions pour bénéficier d’un droit. Si c’est le cas, le droit lui est automatiquement attribué. C’est aussi la forme la plus rare d’automatisation.
  2. L’identification en tant qu’ayant droit potentiel : l’autorité repère qu’une personne pourrait bénéficier d’un droit. Elle prend contact avec elle et lui demande de fournir les justificatifs nécessaires afin que le droit lui soit alloué. L’autorité joue ici un rôle proactif.
  3. L’actualisation automatique : dès qu’une personne est connue de l’autorité, cette dernière peut mettre à jour automatiquement les données de la personne si des nouvelles données arrivent à sa connaissance. Cette procédure peut aussi bien ouvrir que fermer des droits.
  4. La simplification administrative : l’autorité met en place une simplification des procédures des demandes d’accès à un droit. Intervient ici la loi « Only once », entrée en activation au début de l’année 2016, qui implique que les citoyen·nes ne doivent normalement communiquer qu’une seule fois des données auprès de l’autorité et ne se voient pas obligé·es de faire les intermédiaires entre les différents services publics.